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Mécanismes neuronaux de la cognition spatiale

Notre recherche

Où sommes-nous ? Où voulons-nous aller et comment y arriver ? Notre capacité à nous repérer et à naviguer dans notre environnement (notre ville, notre quartier, notre lieu de travail) est essentielle à notre vie quotidienne et son altération dans de nombreux troubles neurologiques particulièrement invalidante. Les structures de la formation hippocampique (hippocampe, cortex entorhinal) jouent un rôle clé dans ce processus. Notre groupe de recherche s’intéresse à la façon dont l’information spatiale est représentée, mémorisée et utilisée pour naviguer efficacement. Nous abordons ces questions chez l’adulte  mais également au cours du développement et dans des troubles du neurodéveloppement associés à des encéphalopathies épileptiques et à des troubles autistiques.

 

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Thèmes de recherche détaillé

Être capable de se repérer dans des environnements familiers est essentiel dans notre vie quotidienne, et les altérations de cette fonction, observées dans plusieurs troubles psychiatriques et neurologiques sont particulièrement invalidantes. On pense que naviguer efficacement repose sur l’apprentissage par l’exploration d’une représentation interne de notre environnement aussi appelée carte cognitive. La formation hippocampique joue un rôle central dans ce processus et contribue également à la mémorisation des événements passés de notre vie quotidienne (mémoire épisodique).

L’activité des neurones de l’hippocampe, appelés « cellules de lieu » est spatialement modulée : dans des environnements riches en repères externes, les cellules de lieu augmentent leur activité dans des endroits spécifiques appelés « champs de lieu » par rapport à ces indices. On parle de codage de position. Cependant, lorsque les repères externes ne sont pas disponibles, les cellules de lieu peuvent s’appuyer sur des informations sensorielles liées au mouvement (telles que la proprioception, les informations vestibulaires) pour moduler leur activité en fonction de la distance parcourue dans des directions spécifiques ce qui permet une navigation basée sur l’intégration du chemin. On parle alors de codage de distance.

Contrairement au codage de position, le codage de distance de l’hippocampe est mal compris et peu étudier.  Notre équipe a développé pour la première fois en France l’utilisation de la réalité virtuelle pour l’étude de la cognition spatiale chez le rongeur. Nous avons montré que les indices visuels externes influencent la résolution du codage de l’information spatiale (Bourboulou, Marti et al., 2019). Récemment nous avons pu isoler le codage de distance hippocampique en l’absence d’indices visuels locaux et montrer une contribution spécifique des cellules de grille du cortex entorhinal à ce codage (Nordlund et al., 2025).

Au niveau cellulaire notre équipe a participé au développement de techniques novatrices permettant d’enregistrer le potentiel de membrane des cellules de l’hippocampe lors de l’exploration d’environnement réels et virtuels (Lee et al., 2009; Epsztein et al., 2010). Ces approches ont permis de montrer un lien entre excitabilité intrinsèque cellulaire et codage de l’information spatiale (Epsztein et al., 2011; Morgan et al., 2019).

Nos projets actuels s’intéressent à l’étude du codage hippocampique au cours du développement (Valeeva et al., 2018) et dans des modèles animaux de troubles du neurodéveloppement associés à des encéphalopathies épileptiques (Milh et al., 2020; Biba et al., 2022) et des troubles du spectre autistique et aux mécanismes cellulaires impliqués.

Activité de différentes cellules de lieu pendant qu'un rat navigue dans un environnement linéaire. Le trajet de l'animal est représenté par une ligne grise. Différents champs de lieu correspondants à différentes cellules de lieu actives dans cet environnement sont illustrés par des disques colorés. (image R. Bourboulou)

Projets spécifiques

  • aInfluence des informations sensorielles externes (allothètiques) et internes (idiothétiques) sur le codage de distance hippocampique
  • bContribution des cellules de grille au codage de la distance et à la mise à jour des cartes cognitives
  • cEnregistrements intracellulaires sur animal éveillé en comportement
a

Influence des informations sensorielles externes (allothètiques) et internes (idiothétiques) sur le codage de distance hippocampique

PI: Jérôme Epsztein & Julie Koenig avec Romain Bourboulou et Geoffrey Marti en collaboration avec l’équipe de Hervé Rouault

Chaque endroit dans un environnement est représenté par l’activité d’un ensemble de cellules de lieu, parmi une plus grande population de neurones silencieux. Cette représentation peut être plus ou moins précise en fonction de la taille de cet ensemble (une plus grande proportion de cellules de lieu étant associée à une résolution de codage spatial plus élevée, comme le nombre de pixels pour une image), de la taille de leur champ de lieu (la surface de l’environnement où elles déchargent correspondant à la taille des pixels) mais aussi de leur stabilité spatiale et temporelle. Les facteurs qui contrôlent la résolution du codage de l’information spatiale sont mal compris. Dans ce projet, nous abordons cette question en tirant parti des systèmes de réalité virtuelle récemment mis au point pour les rongeurs combinés à des enregistrements extracellulaires à haute densité (sondes en silicium). La réalité virtuelle nous permet de mieux contrôler les indices sensoriels que les animaux peuvent utiliser pour se localiser. Nos résultats récents (Bourboulou, Marti et al., 2019) montrent que la résolution du codage spatial peut être modulée localement dans un même environnement. Cette propriété pourrait faciliter la navigation dans des environnements à grande échelle et/ou complexes chez les rongeurs comme chez l’homme.

Vue du dessus et à la première personne d'un environnement virtuel (d'après Bourboulou, Marti et al., 2019)
Enregistrement extracellulaire dans la couche des cellules pyramidales de CA1 de l'hippocampe d'une souris pendant la navigation en réalité virtuelle à l'aide d'une sonde en silicium (8 branches, 64 canaux)
Exemple de décharge de deux cellules de lieu ayant une bonne (gauche) et une moins bonne (droite) résolution de codage spatial. Pour chaque cellule, gauche: position de l'animal lorsque la cellule emet des potentiels d'action essai par essai; droite, taux de déchrage moyen de la cellule en fonction de la position de l'animal dans l'environnement normalisé par le taux d'occupation de chaque position. La partie en gras de la courbe représente l'emplacement du champ de lieu. Stability: index de stabilité; SI : Information spatiale, Out/In : Rapport du taux de décharge moyen de la cellule en dehors de son champ de lieu sur le taux de décharge moyen dans le champ de lieu.
b

Contribution des cellules de grille au codage de la distance et à la mise à jour des cartes cognitives

PI: Julie Koenig avec Mathilde Nordlund

La navigation à l’aide d’une représentation interne de l’environnement ou carte cognitive nécessite des informations allothétiques sur l’agencement spatial des repères externes et des informations idiothétique (liées au mouvement de l’animal comme des informations vestibulaires, proprioceptives ou le flux optique). Chaque  cellule de grille du cortex entorhinal média (CEM) décharge lorsque un animal se trouve aux intersections d’un grille hexagonale qui couvre tout l’environnement . On pense que leur décharge dépend essentiellement des informations internes (idiothétiques)  afin de calculer les distances parcourues dans l’environnement. Cependant, ce point de vue a été remis en question par plusieurs études montrant que les cellules de grille sont très sensibles aux repères visuels externes. De plus, la population des cellules de grille pourrait être fonctionnellement plus hétérogène qu’on ne le pensait auparavant, car elle est comprend au moins deux populations de cellules de la couche 2 du CEM qui sont caractérisées par des propriétés morpho-fonctionnelles différentes : cellules étoilées et pyramidales.
Notre objectif général est de comprendre comment les cellules de grille codent la distance parcourue et comment elles réagissent aux changements locaux dans la disponibilité des repères environnementaux. Pour ce faire, nous profitons du développement récent des systèmes de réalité virtuelle pour rongeurs, un outil efficace pour modifier instantanément et de façon très contrôlée et fiable les environnements.

En haut : Exemples de décharge d'une cellule de lieu (à gauche) et d'une cellule de grille (à droite) enregistrées pendant qu'un animal cherchait de la nourriture au hasard dans une boîte carrée pendant 20 minutes. Pour chaque cellule : A gauche, le carré est la boîte, la trace grise représente la trajectoire de l'animal pendant la période d'enregistrement. Les points rouges représentent les positions occupées par l'animal lorsque la cellule émet un potentiel d'action. A droite: cartes de fréquence de décharge normalisées par le temps d'occupation. Code couleur: rouge = décharge maximale; bleu = décharge minimale. Les cellules de lieu ont généralement des champs de lieu uniques tandis que les cellules de grille ont des champs de lieu multiple situés aux sommets de triangles équilatéraux couvrant l'ensemble de l'environnement. Adapté de Koenig et al, 2011. En bas : différentes structures interconnectées jouant un rôle dans la cognition spatiale.
c

Enregistrements intracellulaires sur animal éveillé en comportement

PI: Jérôme Epsztein with Peter Morgan and François-Xavier Michon

Les mécanismes intracellulaires responsables du recrutement d’une cellule donnée dans l’assemblée cellulaire codant un environnement (allocation mnésique) sont encore mal compris. Pourquoi certaines cellules sont-elles des cellules de lieu plutôt que des cellules silencieuses dans un environnement donné ? Ces cellules sont-elles sélectionnées au hasard ou selon des règles spécifiques ? Des expériences en tranches ont montré que la transformation des entrées synaptiques en sortie sous forme de potentiels d’action est non linéaire dans les cellules pyramidales CA1. Ce phénomène s’explique sans doute par la présence de canaux voltage dépendant dans leurs dendrites qui peuvent générer des potentiels d’action dendritiques locaux ou globaux. Nos enregistrements  en patch-clamp en configuration cellule entière des cellules pyramidales de CA1 de rats explorant librement un nouvel environnement ont indiqué la présence de potentiels en plateau (signature d’une forte électrogenèse dendritiques) et de décharges en bouffée de potentiels d’action (une signature d’excitabilité intrinsèque accrue) spécifiquement dans les cellules de lieu mais pas dans les cellules silencieuses (Epsztein et al., 2011). Sur la base de ces résultats, nous proposons que le niveau initial d’excitabilité intrinsèque des cellules pyramidales CA1 est central à la modulation spatiale de leur décharge et à leur recrutement dans l’assemblée cellulaire codant un nouvel environnement. Nous étudions actuellement le rôle de la plasticité à long terme de l’excitabilité intrinsèque (Morgan et al., 2019) dans la régulation de cette allocation mnésique.

 

A Vue du dessus du labyrinthe. La position de l'animal est repérée par des diodes. B. Trajectoire de l'animal dans l'environnement (ligne bleue) pendant la durée de l'enregistrement en intracellulaire d'une cellule pyramidale de la région CA1 de l'hippocampe. Les points rouges correspondent à la position de l'animal lors de la décharge d'un potentiel d'action par la cellule enregistrée. La plus grande partie des potentiels d'action sont émis lorsque l'animal se trouve dans l'angle inférieur droit du labyrinthe (zone grisée). C. Potentiel de membrane (trace noire en haut) et vitesse de l'animal (trace verte en bas) lorsque l'animal effectue trois tours dans le labyrinthe(trajet vert en B). A chaque fois que l'animal traverse la zone grisée (le champ spatial de cette cellule) ce neuron envoie des potentiels d'action à haute fréquence (barres verticales). Ce neurone est donc une cellule de lieu (codant pour le lieu indiqué en gris). D. Potentiel de membrane moyenné par tour de labyrinthe. On observe une dépolari

Collaborateurs

INMED:

Equipe Rouault

Equipe Robbe

Equipe Cossart

Equipe Crépel

Externes:

Dr. Judith Makara, Institute of Experimental Medicine of the Hungarian Academy of Sciences, Budapest, Hungary

Dr. Alex Roxin, Centre de Recerca Matemàtica, Barceona, Spain

Financements

ERC starting grant FP7


Amidex "Rising star grant"


ANR


Human Brain Project


CENTURI



Nos publications

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Alumni

  • Romain Bourboulou - thèse 2019, maintenant potdoc Barry lab, UCL, Londres
  • François-Xavier-Michon - thèse 2018, maintenant postdoc Lacaille lab, Univ Montréal, Canada
  • David Ouedraogo - thèse 2013, travaille chez Johnston & Johnston
  • Geoffrey Marti - postdoc 2019
  • Peter Morgan - postdoc 2019
  • Caroline Filippi - ingénieure 2019, actuellement équipe Cossart
  • Rachel Carayon - ingénieure 2025
  • Salomé Mortet - Thèse 2025